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Discours des lauréats du Prix Wepler Fondation La Poste

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 Eric Laurrent, Les Découvertes, éditions de Minuit,  2011


Mesdames, mesdemoiselles et messieurs,

Je ne vous dissimulerai pas ma surprise, non d’être ici parmi vous ce soir, attendu que je suis un vieil habitué de la remise du prix Wepler-Fondation La Poste, cérémonie à laquelle je me flatte de m’être rendu chaque année depuis sa création il y a maintenant quatorze ans et où je me fusse, quoi qu’il en fût, trouvé de nouveau cette année, quand bien même mon nom ne serait point apparu parmi les heureux sélectionnés de sa promotion 2011, non seulement assuré d’y revoir quelques amis et connaissances, mais désireux par ma modeste présence de soutenir, fût-ce discrètement, une flûte de champagne à la main, une coquille d’huître dans l’autre, une conception exigeante de la littérature, somme toute peu éloignée de la mienne (ce qu’atteste, si besoin en était, la liste des anciens lauréats, laquelle compte nombre d’auteurs dont j’estime grandement le travail, à commencer par mes illustres camarades de publication Eric Chevillard et Laurent Mauvignier), mais de me trouver là, devant vous, seul ou presque sur cette estrade, à la croisée de tous les regards, en qualité de récipiendaire, n’ayant jamais, en vérité, visé ni même rêvé à quelque prix littéraire que ce soit, par indifférence aux honneurs et dédain pour toute distinction tout d’abord, par lucidité ensuite, conscient que je suis (et ce discours en offrira une nouvelle fois l’illustration) du caractère bien souvent rébarbatif de mon écriture précieuse et contournée, qui réclame sans doute au lecteur plus d’efforts qu’il n’est accoutumé à en fournir en règle générale et en a exaspéré, en exaspère et en exaspérera sans aucun doute encore plus d’un, et que, me disais-je tout au long de sa rédaction, rendrait davantage exaspérante, car plus saillante, le sujet très personnel, intime même, de l’ouvrage qui me vaut d’être devant vous ce soir, soit l’éducation plus sexuelle que sentimentale d’un jeune garçon qui emprunte beaucoup à mes traits, dont, sinon pour moi, qui ai pris grand plaisir à l’écrire, l’intérêt pour autrui m’échappait et continue de m’échapper encore, de sorte qu’il serait en définitive plus exact de parler de stupéfaction que de surprise pour qualifier l’état second qui est le mien tandis que je m’adresse à vous et du fond ouateux, embrumé, torpide mais pas désagréable duquel je voudrais nonobstant vous remercier de m’avoir écouté et, plus chaleureusement, exprimer à mesdames, mesdemoiselles et messieurs les jurés ma vive reconnaissance – et, plus que cela même, mon éternelle gratitude.

 Linda Lê, Cronos, Bourgois,2010

Je suis très émue de recevoir aujourd’hui le prix Wepler/ Fondation de la Poste, parce qu’il récompense un roman différent de ce que j’ai publié jusqu’à présent. Christian Bourgois me rappelait souvent qu’un livre doit susciter un sentiment d’intranquillité. En écrivant une fiction sur l’oppression, la violence et la corruption, mais aussi sur la résistance, j’avais conscience que je pouvais susciter un malaise. Mais j’espérais aussi que cette fable, porteuse d’interrogations sur notre monde actuel, la privation de libertés, les excès du pouvoir, trouverait un écho chez des lecteurs vigilants, prêts à saluer les levées de boucliers lorsque se mettent en marche les machines à écraser l’humanité, comme disait Simone Weil. Face aux formes insidieuses de la dictature, notre tâche est de rester en éveil, de défendre notre droit à la subversion. Dans ce combat, les mots sont de pauvres armes, mais les écrivains que j’admire, les maquisards de la littérature, ont de tout temps ferraillé pour se dresser contre la réaction. Je tiens à leur rendre hommage ici, car c’est en suivant leurs traces que j’ai imaginé une Antigone déterminée à sortir de son fatalisme et à engager une lutte pour ne plus courber l’échine et accepter l’innommable. Même dans nos sociétés dites démocratiques, notre chance réside dans notre incessante quête d’une voie pour l’insubordination. L’Antigone qui sommeille en nous n’attend pas d’être acculée pour se manifester au grand jour.
Je suis très reconnaissante au jury du prix Wepler/Fondation de la Poste d’avoir été sensible à cette tragédie d’une figure de la dissidence et de donner un retentissement à la parole d’une insurgée. Ma pensée ce soir va à mon père et à Christian Bourgois, qui auraient été, je crois, très heureux de ce prix. Je remercie Dominique Bourgois, qui m’a soutenue tout au long de l’écriture de Cronos. Je vous remercie tous d’être présents ce soir.


Lyonel trouillot, Yanvalou pour Charlie, Actes Sud, 2009



Merci au jury. Merci aux organisateurs du prix. Ce que j’ai pu lire et entendre du prix Wepler et des œuvres primées témoigne d’une passion rare pour la littérature. Je dirais de préférence « pour l’écriture ». Et je suis honoré et heureux d’une distinction résolument littéraire qui ne m’appartient d’ailleurs qu’en partie. Une grande partie allant à celles et ceux qui m’ont accompagné tout le long ou à des moments difficiles de ma modeste carrière d’écrivain. A Port-au-Prince un vieil ami avec qui j’aurais voulu partager cette récompense m’avait enseigné qu’il faut toujours dire merci. Permettez que je remercie des absentes, Sabine, Maïté, Manoa, Anne-Gaëlle, ces personnes qui, de très prés et parfois de trop loin, m’apportent l’affection dont on a besoin pour pouvoir, le temps d’une vie, prendre un peu de confiance en soi sans se prendre au sérieux, se poser à soi la question du sens de sa présence au monde et y répondre timidement en essayant d’être. Permettez qu’ensuite je remercie les éditions Actes Sud qui ont amené et accompagné mon travail ici en France, en particulier mon éditrice Marie-Catherine Vacher et mon attachée de presse Emanuèle Gaulier. Seul le formalisme des cérémonies fait que je les nomme ici, par leurs fonctions officielles. Merci à vous deux qui êtes devenues au fil de nos échanges amies de cœur et de littérature. Permettez que je remercie celles et ceux avec lesquels, depuis déjà de longues années (Pierre, Rolph, Michel, Evelyne, Jean…) j’essaye de comprendre et d’aimer le pays dans lequel je suis né, Haïti, où j’ai appris à détester ce que je déteste (les hiérarchies stupides et l’inégal répartition du droit au bonheur) et à aimer ce que j’aime (la libre rencontre entre les individus, le bonheur des corps et le juste partage). Si l’on accomplit seul le travail d’écriture, le regard sur le monde se développe par les inquiétudes et les réflexions partagées.  Je suis un vieux rêveur toujours en formation. Merci à mes vieux frères de combat. On peut trouver seul les mots, mais on ne répond pas seul à la question du sens. Ecrire, pour moi, c’est justement la tension, le déséquilibre entre cette éternelle question du sens et l’eternel travail de la forme. Dans Yanvalou pour Charlie , s’est posée à moi une question essentielle : au-delà de la beauté, peut-il exister une écriture juste ? Qui permettrait au texte, par son enjeu littéraire, c'est-à-dire par les questions qu’il pose à sa propre forme, de témoigner des enjeux du réel, du souhaitable et du condamnable, du vœux et de l’obstacle.

Je remercie enfin l’ensemble des écrivains haïtiens (ils sont nombreux) qui écrivent dans nos deux langues : le créole et le français. Ce que j’écris est en dialogue avec ce qu’eux font. C’est un vaste petit monde que la littérature haïtienne, et je souhaite aux lecteurs francophones de pouvoir le découvrir. Puisse ce prix attribué à Lyonel  Trouillot contribuer à ouvrir les yeux sur l’ensemble de la littérature haïtienne.

Merci encore au jury.


Richard Morgiève, Vertig, Denoël, 2005



                                                           Zéro

Mon chien s’appelait Wik mon chat Bijou mon grand-père Henri ma grand-mère Fleurine ma mère Andrée mon père Stéphane ils sont tous morts.


                                                           Un

Merci à Olivier Rubinstein il m’a accueilli chez Denoël me lit m’encourage et en plus me donne de l’argent.
Merci à Florence Robert mon dirty Harry mon éditrice mon analyste elle me gronde sévèrement travaille quotidiennement pour moi, sans elle je n’écrirais pas les livres que j’écris.
Merci à Nathalie Proth sans elle le lien ne se ferait pas avec les journalistes.


                                                           Zéro

J’ai cru que j’étais orphelin mais j’ai découvert que non j’étais l’enfant du langage.

                                  
                                                           Un

Merci à la Fondation la Poste en oubliant la dernière lettre elle m’a donné un livre.

                                  
                                                           Zéro

Cela fait vint-cinq ans que j’écris, la valeur n’attend pas le nombre des années mais les années mesurent l’engagement, l’amour.


                                                           Un

Merci à la brasserie Wepler les écrivains ont besoin de vin.


                                                           Zéro

Au fil des années j’ai compris que j’étais unique qu’il n’y avait qu’un Richard Morgiève au monde qu’il fallait que je sois unique, sincère.

                                                          


Un

Merci à Alice Massat elle me psychanalyse tous les jours me gronde au moins douze fois par semaine sans elle je ne serais pas celui que je suis devenu sans elle je n’aurais pas abordé certains sujets.

                                                           Zéro

En continuant de m’efforcer d’être libre et vrai j’ai compris qu’avoir de la culture ne voulait rien dire j’ai compris que c’était ma culture qui comptait. J’ai compris que l’art n’était jamais reconnu mais qu’il reconnaît mais ça je ne le dois à personne c’est pour moi.

                                              
                                                           Un

En filigrane des vœux de l’œuvre il me semble qu’il y a toujours le mot espoir. Je ne vide pas toujours mes poches mais au bout de 40 ans de Lavomatic l’espoir demeure résiste à tous les lavages et bien sûr au temps. Je remercie donc le jury du Prix Wepler Fondation La poste d’avoir déplié mon livre et su trouver mon espoir.

                                  
                                                           Zéro

Je remercie Marie-Rose Guarniéri pour son engagement sans elle rien ne serait possible. 


Marcel Moreau, Corpus scripti, Denoël, 2002
 
   Je vous avais concocté un petit hourrah de derrière les fagots. Vous avez dû le constater : hourrah est une exclamation qui se meurt, dans l’indifférence générale. Elle n’est pas la seule, parmi les sonorités nées des relations quasi incestueuses entre le souffle et la salve, à périr ou dépérir ainsi, atteintes par une maladie affectant leur musicalité même. La consommation abusive des décibels de merde, à notre époque, n’arrange pas les choses. Elle nous rend sourds à l’intime résonance de certains mots n’ayant que le tort de ne pas participer de la cacophonie ambiante et dont la mode décrète qu’ils ont fait leur temps. Ils n’ont d’autre choix que de disparaître, le plus souvent sans bruit, à la suite d’une longue insonorisation. Le cimetière lexical en est plein, de ces vocables de vieille souche artisanale et par surcroît propitiatoire, victimes d’une sorte d’eugénisme subtil, appliqué à leur élimination. J’ai dit « cimetière ». En fait, il s’agit plutôt de fosses communes. Leur silence, effrayant, nous donne la mesure de l’importance de la perte, pour l’ouïe, ou ce qu’il en reste, après occupation de l’acoustique par les poids lourds de l’onomatopée. Dois-je vous rappeler que hourrah nous vient des Cosaques, ce qui est quand même une garantie de tonitruance épique, dans le registre des époumonements exempts de slogans, et d’expectoration. Aujourd’hui, hourrah se voit évincé par bravo, youpie, chauffe Marcel, ou alors par ouaah, ouaaah. Si en ce moment, je m’écriai hourrah Pierre, Denis, Marie-Rose, Florence, Emmanuelle, Isabelle, hourrah Etc., nombreux seriez-vous à vous demander quelle mouche m’a piqué. Effectivement, j’aurais été piqué par une mouche d’origine cosaque, elle-même en voie d’extinction. Pour tout vous avouer, je m’adonne, du côté de mes fonds de gorge, à l’élevage de petits hourrahs, n’ayant plus de cosaque que le souvenir que j’ai de mes exultations infantiles à la vue d’une genou de nymphe, ou d’une tournure de phrase laissant deviner un peu de sa région pubienne, à travers une gaze transitoire, dans un livre déconseillé aux moins de seize ans. Mes petits hourrahs, eux, en guise de merci, se murmurent confidentiellement à l’oreille de ceux et de celles auxquels je me sens redevable de quelque ivresse profonde et durable. Ce soir, je vous remercie tous. Certes, je préférerais vous remercier chacun en particulier, mais il faudrait pour cela que mon élevage de petits hourrahs s’accrût du don d’ubiquité, ce qui n’est pas vraiment le cas. Car les temps ne sont pas durs que pour le pouvoir d’achat, ils le sont également pour les élans de reconnaissance et les superlatifs qui vont avec. Mon vocabulaire a beau être fourni, sur ce chapitre, il se trouve dans l’obligation de modérer ses dépenses en effusions. Les nécessiteux qui me lisent me comprendront. Pour ce qui est des nantis, dont le cœur ne bat que pour la Bourse et les dividendes, ils ne me lisent pas, ce qui leur évite de penser que leur misère morale est plus grande que la difficulté que j’éprouve à distribuer équitablement, en manière de gratitude, la richesse sensorielle que me vaut, par exemple, votre présence ici.
Le lexique est facétieux, il fait rimer parfaitement banque et saltimbanque. Cela ne donne pas pour autant au contenu de ces mots un air de famille. Heureusement me reste l’Amour qui, jusqu’à preuve du contraire, échappe à la paupérisation. J’entends l’amour des mots, évidemment, dont dépend si souvent que l’amour humain soit un pari osé sur l’absolu ou tout juste, hélas, une affaire de tombola. Aimer les mots, y compris les gueux, les sans-abri, les laissés-pour-compte, et davantage en possédé qu’en dilettante, c’est, j’en fais chaque jour l’expérience, maintenir en état d’inflammation signifiante la morsure charnelle du dépassement de soi, pour prix d’un essentiel à vivre. Longtemps, je fus correcteur. C’est un métier qui fit de moi l’obscur serviteur de cette cause humanitaire mal connue qui consiste à soulager de ses souffrances la population en haillons d’une prose privée de ses droits élémentaires au style et au chant. Cette forme d’amour des mots a eu probablement le mérite de me rappeler que les passions auxquelles sont en proie la plupart des individus se situent au-delà de la mécanique et de la chimie à quoi prétend les réduire le discours dominant. Car dès lors que les mots nous pénètrent par tous les pores comme autant de corps désirables écumant notre corps biologique en posture de concupiscence, c’en devient un langage galbé, frissonnant, sudoripare, sexué, ayant pour effet de multiplier en nous les zones érogènes et jusqu’aux occasions qui s’offrent à notre âme romantique de joindre la délicatesse de ses sentiments à l’impudeur des pulsions lascives. C’est alors que l’orgasme qui s’ensuit fait toujours un peu figure d’innovation, dans le domaine des quêtes d’éternité n’excédant pas quelques secondes.
Le corps écrivant, lui, est en quelque sorte un prolongateur de coups de foudre. En ce sens, on peut parler d’un rythme inexorable. Si j’ignore d’où il me vient ce rythme, je sais que là où il va et m’entraîne, il y a de l’inattendu et de l’inclassable dans l’air. Quelque chose d’océanique, disons une lame de fond, semble vouloir me libérer des ancrages de la dialectique et recommencer à ses roulis et tangage la navigation à vue du livre en train de se faire. Cela n’exclut pas le doute, bien au contraire, mais en l’occurrence le doute ne tient pas en place, il tressaute, il s’ébroue, il bondit. Donc, rien à voir, cette dynamique, avec ce que l’on appelle l’accélération de l’histoire, laquelle n’est jamais que le passage à la vitesse supérieure des forces de l’avoir, dans leur projet, funeste entre tous, de laisser loin derrière les forces de l’être. Il n’y a pire que cette accélération de l’histoire. À la cadence de ses faux progrès et idolâtries du profit pour seuls ressorts, elle précipite le crépuscule de toute civilisation qui aurait le mauvais goût de s’y conformer.
Quand ce corps n’écrit pas, il est la plus lourde des masses encombrantes et presque inamovibles, interdite d’allégresse. Au plus bas de sa rythmique, il voit tout en noir et le pessimisme que lui inspire l’évolution du monde semble alors participer de la langueur lugubre des spleens inconsolables. Par bonheur, il écrit beaucoup, à perdre haleine, et si possible dans le sillage d’une créature chérie dont la volte-face lui collera délicieusement à la peau. J’ai de la chance : mon écriture danse. N’exagérons rien, elle patauge en lévitation. De toute façon, mes mots dansent mieux que le corps démantibulé qui les écrit. Très peu pour eux, les accroupissements syntaxiques, et les affalements sous le fardeau d’une grammaire s’étant par trop gavée de sucreries. Quand je dis « danse », peut-être ne s’agit-il que d’un mouvement infatigable et oscillatoire de l’acte d’écrire, impulsé par le corps lui-même, à ce point possédé de mots que ses usures et disgrâces le sont aussi. D’où l’incapacité où je me trouve de répondre clairement à la question « comment va ta santé ? », puisque, pour le coup, j’ignore de quelle santé on me parle, si c’est celle, poussive, de mon vieillissement d’homme, ou si c’est celle, primesautière, de mes trépidations d’écrivain. Comme elle est étrange, cette écriture : elle n’est jamais plus intenable que lorsqu’elle devance d’une incarnation les symptômes avant-coureurs de ma chute finale. Ainsi, pas plus tard qu’hier, j’ai vu certains de mes mots, du moins les plus alertes d’entre eux, s’essayer au Sacre du printemps. C’était idiot de leur part : ils n’ont même pas le sens de la chorégraphie. De ce Sacre, ils ne réussiront qu’à jeter sur le papier le brouillon illisible, dans un grand enchevêtrement de suffixes et d’allitérations. C’était pétulant, mais à l’arraché, étant donné les ratures, les biffures, les repentirs. Autre genre : tous les jours, aux aurores, des phrases entières, hirsutes, insomniaques se font la courte échelle, dans mon demi-sommeil. La plus haute sonne fort. Elle m’annonce, entre tocsin et buccin, qu’il est temps que je me lève. Je me lève. Il est 5 h. Mes mots sont très très matinaux, ils n’aiment rient tant que poindre, poindre, poindre. Les entrailles du langage et celles du corps écrivant ont cela en commun qu’elles donnent de la poigne à la chose dite ou à dire, surtout à son contenu. Ce soir, la poigne a du cœur au ventre. L’émeut le fait que vous vous soyez déplacés si nombreux pour entendre et voir à quoi peut bien ressembler un déhanchement du sens des mots dans la vie organique d’un bipède comme les autres. Je ne suis pas loin de penser qu’en ce moment mes mots ont le feu aux articulations. Ce qui est sûr, c’est que leur enthousiasme a des fourmis dans les jambes, de grosses fourmis un tantinet cosaques, après tout, pourquoi pas ? Peut-être est-ce le même enthousiasme que le dictionnaire Furetière, en 1693, définissait ainsi : une fureur prophétique ou poétique, à quoi j’ajoute « affective ». Je vous dois, ce soir, d’éprouver cet enthousiasme à l’ancienne. Il ne se fera pas facilement oublier. Il se conjugue d’ores et déjà, en ce qui me concerne, au futur intérieur… Je vous salue bien et vous souhaite une belle nuit, étoilée d’écriture, pas la mienne, non, non, la vôtre, celle de tout votre être, jetant bas ses non-dits.
Marcel Moreau




 

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